C’est (au journal) officiel : je suis un (libre) voleur (du savoir numérique)

08/01/2007, par jmm
[ Impression | 11 réactions ]

Fin 2006, je me découvrais vieux con, déplorant que nos petits enfants se fassent offrir des jouets leur permettant d »espionner où on veut et comme on veut… même dans le noir (et) sans bouger !« . Début 2007, j’apprends que je suis un voleur, passible de 750 euros d’amende, parce que je n’utilise que des logiciels libres.

Downloading communismEn janvier 2006, j’écrivais un édito intitulé « Je ne suis pas (encore) un voleur« , pour InternetActu. En pleines polémiques sur le projet de loi DADVSI visant à réprimer le P2P, je me permettais en effet de rappeler que :

La société de l’information a ceci de particulier que la majeure partie des gens y ont été (ou sont encore) en infraction avec la loi (…) je ne connais personne qui n’ait, un jour, utilisé de versions “pirates” de logiciels. (…) Qu’on le veuille ou non, le développement des usages, et du marché des NTIC, repose en bonne partie sur le “piratage“.

A l’instar de nombreux autres observateurs, je déplorais dans le même temps le fait que le projet de loi ne prévoit strictement rien pour les utilisateurs de logiciels libres et de systèmes d’exploitation GNU/Linux, qui sont dans l’impossibilité de lire nombre de CD et DVD : leurs « mesures techniques de protection » (MTP, ou DRM) ne fonctionnent que sous Windows & Mac (pour une explication plus détaillée, voir « Les DRM sont aux logiciels libres ce que les pesticides sont aux produits bio« ).

Alors que les utilisateurs de PC “libres” faisaient partie des rares à ne pas pouvoir être soupçonnés d’enfreindre la loi, la DADVSI va les pousser à la contrefaçon, et les faire rejoindre la cohorte de tous ceux, majoritaires certes, mais hors la loi, pour qui le piratage des logiciels est une pratique somme toute banale.

La DADVSI a été adoptée. Elle n’oblige nullement les ayant-droits à me permettre de lire les produits qu’ils mettent en vente dans le commerce. Le Journal Officiel nous apprend par contre que la DADVSI punit désormais d’une amende de 750€ ceux qui contourneraient les « mesures techniques » de protection de ces oeuvres-là.

Si d’aventure il m’arrivait d’acheter un tel bien culturel, en « vente libre« , il me faudrait le pirater pour pouvoir en profiter sur mon « OS libre« . Tout ça parce que je fais partie de ces libres enfants du savoir numérique ( * ) pour qui la connaissance n’a pas de prix, pour qui la culture n’est pas d’abord une industrie, et qui réclament le « droit de lire« , tout simplement.

Libre, je suis donc un voleur. Les propriétaires qui m’empêchent de pouvoir lire ce que je leur ai acheté, non.

Downloading capitalismM’est avis que nous serons de moins en moins nombreux à aller acheter leurs produits culturels, et de plus en plus nombreux à privilégier les contenus « libres« , d’autant qu’il y en a, tout plein, ici & là :

http://musique-legale.info/ : plein de musique gratuite et légale à télécharger, en MP3 ou en Ogg Vorbis

http://www.dogmazic.net/ : 729 heures de musique disponibles, soit 9272 morceaux par 1024 groupes et 110 labels sous 25 licences écoutés ou téléchargés 11867875 fois en 715 jours, cela en toute quiétude et en toute légalité

http://www.goingware.com/tips/legal-downloads.html : Links to Tens of Thousands of Legal Music Downloads

http://www.archive.org/details/audio : +110 000 audio recordings from alternative news programming to Grateful Dead concerts, to Old Time Radio shows, to original music contributed by users.

http://www.archive.org/details/netlabels : the Netlabels collection at the Internet Archive hosts complete, freely downloadable/streamable, often Creative Commons-licensed catalogs of ‘virtual record labels’.

http://www.phlow.de/netlabels/index.php/Main_Page : the Netlabel Catalogue, a list, index, directory of music labels which offer you free downloads from their pages.

http://www.prisonsoup.com/ : electro experimental netlabel : mp3 libres de droits pour la diffusion, distribution ou la modification, dans le respect de la licence art libre.

etc., etc. si vous en connaissez d’autres, particulièrement pertinents, n’hésitez pas, faites tourner !


—-
*. une anthologie du « libre » préparée par Olivier Blondeau et Florent Latrive, avec des textes de Richard Stallman, Bruce Sterling, John Perry Barlow, Richard Barbrook… l’une des bibles de la (contre-)culture « libre« , qui existe en version papier, aux éditions de l’Eclat, mais que l’on peut aussi librement lire & consulter sur le web, .

Share/Save/Bookmark
Et/ou suivez-moi par RSS (),
sur Twitter, ou via la newsletter :

Réf. [ (In)sécurité, FUD ]
Imprimer | Répondre | Me contacter
Feed RSS des commentaires
54 076 views | Permalien | Trackback

11 Réponses a “C’est (au journal) officiel : je suis un (libre) voleur (du savoir numérique)”

  1. Phileas :

    Devant la folie sécuritaire de Vista, je pense sauter le pas et me tourner vers ubuntu, histoire de commencer en douceur. Or mes collègues linuxiens m’ont expliqué que lire des mp3 ou un dvd acheté dans le commerce nécessitent d’installer des « codecs » illégaux depuis la DADVSI… ubuesque !

    Enfin, heureusement qu’il reste pas mal de sites de musiques « libre ». Mais pour combien de temps ?

    Je peux vous proposer ce site aussi : http://www.jamendo.com/be/
    De quoi se remplir les oreilles avec du ogg.

    Et encore, comme il utilise le p2p comme moyen de diffusion, je pense qu’on est tout de même dans l’illégalité >_>

    A croire qu’Internet est devenu une prison à ciel ouvert

  2. kidd :

    et l’excellent http://www.ubu.com/ qui se décline notamment en http://www.ubu.com/sound/ et http://www.ubu.com/film/ !

  3. Ulhume :

    @Phileas

    Lire des MP3 n’a rien d’illégal sous Linux. Il est vrai que la technologie MP3 appartient à fraunhofer mais tant qu’ils ne crient pas… Il existe cependant un format libre de musique : Vorbis OGG.

    Maintenant concernant les « MP3 » acheté dans le commerce, ce sont rarement des MP3, mais plutôt des AAC (Apple), WMA (Microsoft), etc… qui sont protégé par des Droits Numériques. Donc on ne peut pas les casser sans tomber sous DADVSI. Le « codecs » en revanche dont parlent tes amis ne sont pas illégaux tant que tu as une licence de Windows. En effet, ce sont des binaires permettant de lire le format mircosoft. Ces binaires sont contenus dans Windows. Donc rien ne m’empêche d’utiliser ces fichiers dans Linux. Le problème c’est donc les DRM, pas les Codecs. Une solution ? Ne pas acheter de musiqe sur Internet, acheter des bon vieux CD qui coûtent beaucoup moins chère, sont physique, transformables en MP3 ou OGG très facilement et légalement (copie privée autorisée dans ce cas), revendables et échangeables (attention à supprimer les sauvegarde MP3/OGG dans ce cas, question d’honnêteté !),

    Lire un DVD est illégal (attention, je n’incite pas, j’explique ;-) depuis DADVSI pour tout utilisateur d’un lecteur de DVD libre (Mplayer, Xine, etc…) qui utilisent la librairie de cassage de clef DVD. En revanche Mandriva dans sa version payante inclut un lecteur de DVD totalement légal (LinDVD). Ceci dit pour des raisons faciles à deviner, ce lecteur n’est pas achetable directement (je veux dire sans une distribution linux).

  4. julien :

    Pour parler des videos libres, voici un film 3D créé par des logiciels libres et distribué sous licence libre :

    http://www.elephantsdream.org/

    Puis une maison de production de Lyon qui fait des films en licences Art Libre et Créative Commons :

    http://www.ralamax.net/

    coté musique vous aviez deja parlé de ceux que je connais.

  5. yan grel :

    Je vous lis. Je suis d’accord avec vous. C’est le monde à l’envers. Cependant, je ne me fais pas d’illusions. S’il n’est pas possible de lire directement un CD ou un DVD sur un OS libre. Les gens ne feront pas le saut. Au contraire, ils resteront sur des solutions sures, « plug and play ». La plupart des gens ont déjà du mal à installer un plug in comme Acrobate, alors changer d’OS. Ne rêvons pas. Tant que « le libre » ne sera pas capable de fournir des produits de qualité et de facilité d’utilisation comparables à Microsoft ou autres ténors de l’informatique, le libre vivotera au mieux, voire disparaitra au prie.

  6. jmm :

    @yan grel : cela fait maintenant des années que mes ordinateurs utilisent des systèmes d’exploitation GNU/Linux, et ils sont de plus en plus simples à installer, encore plus simples à utiliser

    . Ordissimo, « l’ordinateur le plus simple du monde« , tourne sous GNU/Linux

    . Ubuntu, la distribution libre la plus en vogue en ce moment, propose un CD Live (on insère le CD, on redémarre son PC, et on se retrouve sous GNU/Linux) qui permet, d’un simple clic de souris, d’installer cet OS libre, qui reconnaît quasiment tous les périphériques en mode « plug and play », dispose de dizaines de logiciels préinstallés, et de milliers de logiciels installables en quelques clics : franchement, je ne vois vraiment pas ce qui vous bloque… et encore moins ce qui ferait que le libre pourrait disparaître.

  7. Phileas :

    Merci pour les précisions Ulhume ;)

  8. Ythogtha :

    Je ne suis pas sûr que l’utilisation de la libcss soit interdite par DADVSI.
    Tout dépend de la définition d’une MTP.
    MTP c’est Mesure Technique de Protection, d’accord, mais de protection contre quoi ?
    Il me semble que c’est de protection contre la copie, le piratage etc, non ? Ca ne peut pas être de protection contre le visionnage, puisque un DVD est vendu, ou plutôt acheté, pour être regardé ?

    CSS ne « protège » que contre le visionnage, en effet, si vous dupliquer bêtement, octet par octet, un DVD crypté via CSS, vous obtenez un nouveau DVD, crypté via CSS et lisible exactement dans les mêmes condition que l’original. CSS ne protège donc en rien contre la copie (on trouve de plus en plus des ISOs de DVD sur le net, télécharge plusieurs Go ne fait plus peur aux gens).
    Par contre si vous n’avez pas d’outil permettant de décrypter ce DVD : impossible de le regarder !
    CSS est une mesure de protection contre le visionnage exclusivement.

    Quelles sont les MTP visées par DADVSI ? CSS en fait-elle partie ?

    Bref, tout ça est terriblement absurde, car dans le cas de CSS on voit très clairement que le seul but de cette « protection » n’est absolument pas d’empêcher la copie, et la duplication illégale d’un oeuvre, mais juste de restreindre les moyens disponibles pour la regarder…

    Yth.

  9. Vincent Bernay :

    Il y’a aussi Free samples N loops qui propose du téléchargement légal et gratuit d’artistes indépendants: http://www.free-samples-n-loops.com/free-music-downloads.html

  10. edenysi :

    bonjour bien que je soit jeune (et con)
    je ne croit pas me tromper en disant que http://www.deezer.com est(encore) légale
    et merci de m’apprendre que je suis aussi un voleur en tournant sur GNU/Linux

  11. Je n’ai pas le droit de lire le livre que j’ai acheté | BUG BROTHER :

    […] seul moyen de pouvoir lire le livre que j'ai légalement acheté, c'est de le pirater, et donc de violer la loi qui interdit de contourner les DRM, quand bien même c'est la seule façon que j'ai de pouvoir lire […]

Répondre